Quelle est l’action de l’OSCE dans la dimension humaine de la sécurité ?
Dimension humaine de l’OSCE
Formant à l’origine la troisième corbeille de l’acte final d’Helsinki (1975), les engagements pris dans le cadre de la dimension humaine portent sur le respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales mais aussi sur celui des standards démocratiques. Cette dimension a été constamment réaffirmée et enrichie par les textes ultérieurs adoptés dans le cadre de la CSCE puis de l’OSCE. Cet enrichissement a été à la fois quantitatif, de nouveaux engagements ayant été régulièrement souscrits, et qualitatif au sens où des mécanismes de surveillance des engagements ont été créés.
I. Nature et étendue des engagements au titre de la dimension humaine
La dimension humaine a un champ d’application très large : respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales mais aussi questions relatives à la démocratie et à l’Etat de droit, lutte contre toutes les formes de discrimination, protection des personnes appartenant à des minorités nationales et toute autre question d’ordre humanitaire connexe. Cette dimension fait partie intégrante du concept de sécurité globale, indivisible, coopérative et trans-dimensionnelle de l’OSCE au même titre que la dimension politico-militaire et la dimension économique et environnementale.
Ces questions font l’objet d’un examen attentif et régulier de l’OSCE, sans que l’Etat mis en cause puisse valablement invoquer le principe de non-ingérence. En effet, comme le rappelle le Document de la Conférence de Moscou (1991), « les engagements contractés dans le cadre de la dimension humaine sont un sujet de préoccupation directe et légitime pour tous les Etats participants et ne relèvent pas exclusivement des affaires intérieures de l’Etat concerné ».
Depuis 2003, de nouvelles thématiques ont été abordées dans le cadre de la dimension humaine. Un plan d’action a été adopté en 2003 sur la lutte contre la traite des êtres humains. De surcroît, deux autres plans d’action ont été adoptés pour la promotion de la parité hommes/femmes et pour l’amélioration de la situation des Roms et des Sintis.
La déclaration d’Astana (2010) contient une réaffirmation forte des engagements en matière de dimension humaine et, notamment, de l’idée selon laquelle le respect des droits de l’homme ne relève pas exclusivement des affaires intérieures des Etats participants de l’OSCE.
II. Mécanismes de surveillance
a) Plusieurs institutions autonomes de l’OSCE contribuent de façon déterminante à la dimension humaine :
Le Bureau des Institutions Démocratiques et des Droits de l’Homme (BIDDH) : établi à Varsovie et dirigé depuis décembre 2020 par M. Matteo Mecacci (Italie), le BIDDH joue un rôle crucial dans le domaine de l’observation et de l’assistance à l’organisation des élections, du soutien à la démocratisation et à l’édification de l’Etat de droit, de la lutte contre l’intolérance et de la protection et promotion des droits de l’Homme en lien avec la société civile. Il déploie des projets d’assistance et de formation à la demande ou avec l’accord des Etats participants, rédige des lignes directrices et organise les réunions des Etats participants en lien avec la Présidence en exercice.
Le Haut-Commissaire pour les Minorités Nationales (HCMN) : exercée depuis décembre 2020 par M. Kairat Abdrakhmanov (Kazakhstan) cette fonction a été créée au Sommet de d’Helsinki (1992) dans le contexte de la crise en ex-Yougoslavie. Le HCMN a pour mission d’identifier les tensions liées aux minorités nationales n’ayant pas encore atteint le stade de la crise ouverte et de proposer aux Etats concernés des solutions conformes à leurs engagements internationaux. L’action du Haut-Commissaire repose sur la conduite d’une « diplomatie discrète », conjuguée à la mise en œuvre de projets principalement axés sur l’éducation et la réforme de l’administration.
Le bureau de la Représentante pour la liberté des médias (RPLM ou RFOM) : créé en 1997, ce poste est occupé, depuis décembre 2020, par Mme Teresa Ribeiro (Portugal), qui a succédé à M. Harlem Désir (France). La Représentante pour la liberté des médias se mobilise pour la liberté des médias et la libre circulation de l’information, y compris sur internet ou bien encore la protection des journalistes. Son mandat comporte deux volets : la détection des atteintes à la liberté d’expression et l’assistance aux Etats.
b) des mécanismes ont vocation à assurer la bonne mise en œuvre des engagements souscrits dans le cadre de la dimension humaine :
Les réunions d’examen sur la dimension humaine (Human Dimension Implementation Meeting) se tiennent habituellement chaque année durant la dernière semaine de septembre et la première semaine d’octobre à Varsovie afin de faire le bilan de la mise en œuvre des engagements pris au titre de la dimension humaine. Ces réunions d’experts ont la particularité d’être ouvertes aux ONG et aux représentants de la société civile. Ces réunions n’ont toutefois pas pu se tenir depuis 2019, en 2020 en raison de la pandémie de Covid-19, puis depuis 2021 de l’obstruction de la Russie. La présidence polonaise de l’OSCE a décidé d’organiser une conférence de la dimension humaine à Varsovie, sur le modèle du HDIM, du 26 septembre au 7 octobre 2022, afin de permettre à la société civile de retrouver un forum de discussion pour échanger avec les États participants de la mise en œuvre de leurs engagements dans la dimension humaine. Le BIDDH organise également chaque année à destination des experts des capitales, en plus de la réunion d’examen, trois conférences thématiques de deux jours à Vienne et un séminaire d’une semaine à Varsovie. En outre, les représentants des États participants de l’OSCE se réunissent une fois par mois à Vienne dans le cadre du comité de la dimension humaine pour faire le point sur la mise en œuvre des engagements et les possibilités de la faire progresser.
Institué par le Document de Vienne (1989) puis complété par les documents issus des conférences de la dimension humaine de Copenhague (1990) et de Moscou (1991), le mécanisme de la dimension humaine (aussi appelé mécanisme de Moscou) est un instrument spécifique d’enquête sur la situation des droits de l’Homme dans un État participant. Mis en œuvre à l’initiative de l’État concerné, ou de tout État participant (il peut alors être déclenché sans le consentement de l’État intéressé), il aboutit à la création d’une commission d’experts indépendants (sur demande d’au moins dix États) dont les conclusions sont examinées par le Conseil permanent. Il a été déclenché trois fois en 2022. La France et 44 autres États participants, soutenus par l’Ukraine, ont invoqué le 3 mars et le 2 juin le mécanisme de Moscou au sujet des violations des droits de l’Homme et du droit international humanitaire à la suite de l’invasion russe en Ukraine. 38 États participants, dont la France, ont également invoqué le 28 juillet le mécanisme de Moscou sur les violations des droits de l’Homme en Russie.